14.8.08

| L'extraordinaire modèle conquérant chinois |

La Chine part à la conquête du monde. Cet immense empire autrefois campé sur ses limites orientales est désormais la grande puissance, certes discrète, de notre monde globalisé. Mais la Chine ne suit pas les modèles impérialistes occidentaux, erreur commise par le Japon à la charnière du 19e et du 20e siècle. La Chine use d'une toute nouvelle stratégie puisée dans les traités de stratégie militaire des temps antiques. Son secret : la claire et nette séparation entre le commerce et la politique.
Présente au Soudan, en Birmanie, en Iran, au Vénézuala, la Chine débarque non comme un état souverain mais comme une gigantesque corporation industrielle, en fait la plus grosse corporation mondiale : plusieurs dizaines de millions d'ouvriers à des tarifs horaires défiant toute concurrence, des centaines de secteurs d'activité, des liquidités en dollars quasiment infinies et la volonté de s'arroger les meilleures part de marché dans l'énergie.
Que propose la Chine à des pays comme le Soudan ou le Tchad ? Le déploiement d'infrastructures d'exploitation des champs pétrolier actuels ou futurs, ce qui comprend aussi des routes, des infrastructures d'hébergement, des usines, des projets immobiliers, des chemins de fer, en bref les infrastructures qu'aucune autre corporation privée ne peut proposer à un gouvernement. Non seulement la Chine offre tout cela mais à des taux de remboursement interdisant toute compétition à des multinationales ultra financiarisées prisonnières du bénéfice à court terme.
Quelles conditions la Chine impose-t-elle à ces pays ? Aucune ! Rien ! Nada ! Alors même que la banque mondiale ne consent des prêts qu'à des états qui s'engagent à respecter des gouvernances dictées par les gouvernements occidentaux (U.S. et Europe), la Chine déclare qu'elle n'intervient pas dans les affaires politiques et la souveraineté des peuples et des nations.
L'Occident crie au loup dénonçant la politique du laisser-faire. Mais la Chine ne répond rien et se contente de laisser les états régler leurs propres affaires quelques soient les factions au pouvoir. Il n'y a aucun cynisme dans cette démarche gagnant-gagnant car non partisane. La diplomatie commerciale chinoise est bénéficiaire dans tous les cas et inscrit sa politique dans une séparation stricte entre le commerce et la politique, au grand dam de la "communauté internationale".
La Chine dispose d'autres atouts efficaces pour repousser les tentatives hégémoniques des grandes corporations mondiales et des états qui leur sont soumis. Elle dispose d'un siège permanent au Conseil de Sécurité de l'ONU, au même titre que les Etats-unis, la France, la Grande-Bretagne et la Russie. Son droit de veto lui permet de paralyser la seule entité qui intervient régulièrement dans les affaires intérieures des états "rebelles".
Et si cela ne suffit pas, la Chine dispose d'une arme encore plus puissante : des réserves en dollars gigantesques. Premier bailleur de fonds des Etats-unis, la Chine dispose là du levier le plus puissant qui soit sur l'économie américaine et donc sur l'ensemble des corporations internationales.
La Chine conquiert le monde, et les vieilles stratégies impérialistes occidentales ne sont pas taillées pour l'arrêter.
Transformant le poison en élixir, la Chine a su et saura tirer parti des faiblesses apparentes du système libéral occidental pour le retourner contre les artisans historiques de ce dernier. La Chine change dans un monde qui tarde à entamer une transformation radicale de ses conceptions et de ses représentations. Et nous savons tous que les résistances au changement sont souvent les ferments de guerres aux dimensions mondiales...

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